lundi 10 février 2014

Ca pourrait se passer près de chez vous.

L'autre soir, j'ai regardé le film God Bless America, de Bobcat Goldthwait. L'histoire : un américain banal vit à coté d'un couple de débiles, travaille avec des crétins et regarde de la merde à la télévision. Tout le monde se reconnaîtra dans son portrait ainsi que dans la critique qu'il fait de la société, ici hautement caricaturée mais finalement pas si éloignée de l'état actuel des choses. Lorsqu'il découvre qu'il va mourir d'une tumeur cérébrale, il s'embarque dans un road trip où il va buter les gens qui le gonflent, accompagné par une jeune ado qui partage son ras-le-bol.



Ce film s'incrit dans la lignée de pas mal d'autres films. Je pense d'abord à Chute Libre (1993), où un homme vient de perdre son emploi, en as ras-le-bol et va se retrouver dans une spirale de violence. Je pense ensuite vaguement à Idiocracy (2006), où la société est submergée par de plus en plus de débiles. Je pense, enfin et surtout, à C'est Arrivé Près de Chez Vous (1992) où, pour un reportage de télé-réalité, on suit un tueur en série. On ajoute à cette liste Natural Born Killers (1994) qui a bien ce principe du roadtrip d'un couple de spree-killers, sans la critique de la société (quoique, il y a quand même une critique de la télévision qui transforme les deux tueurs en stars de télé).

Avez-vous remarqué la proximité des dates de sortie de tous ces films ? C'est une tendance forte des années 90. D'ailleurs, la décennie se termine sur Fight Club (1999), où le consumérisme est critiqué via une étonnante auto-destruction.

Le gros défaut de God Bless America, c'est son manque de recul. Il s'agit d'un défouloir. On nous fait adhérer aux personnages principaux, qui accomplissent un truc dont on a toujours - dans un gros moment d'énervement - rêvé, saupoudré de quelques slogans bien sentis ("A quoi bon parler de civilisation quand plus personne ne veut se comporter en civilisé ?"). Et ? Et c'est tout.

Le génie de C'est Arrivé Près De Chez Vous, c'est de parvenir à accomplir une critique de ceci. L'assassin, Benoît, est moqueur, drôle et attachant. On le trouve de plus en plus sympathique. On devient son pote au cours de la première moitié du film... Mais au milieu du film, un instant d'horreur, auquel le spectateur-voyeur participe par le truchement de son inclusion à l'équipe de tournage du film (son oeil-caméra) fait réaliser, rétrospectivement, l'horreur de tout ce qui a précédé. Le piège s'est refermé et, à partir de cet instant, le spectateur s'est pris la leçon dans la trogne et la seconde moitié du film achève la punition pour avoir adhéré à la première moitié.

God Bless America, au contraire, tombe dans le piège facile qui est de faire ce qu'il critique au début. Le personnage abandonne sa sacro-sainte civilisation et finit par devenir ce qu'il déteste sans qu'à aucun moment le film ne se pose la question. Dommage. Reste quelques bonnes répliques...

God Bless America, sorti le 11 septembre 2011 (je doute que ça soit un hasard)
de Bobcat Goldthwait

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